La crise du logement social en France s’aggrave




Le 13 Septembre 2024, par François Lapierre

Alors que plus de 2,6 millions de ménages attendent un logement social en France, le secteur est marqué par une baisse alarmante du nombre de nouvelles constructions et par des tensions financières. Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH), dénonce le désengagement du gouvernement, qui a gelé une partie des financements dédiés à la rénovation du parc social.


Un nombre record de demandeurs de logements sociaux

La demande de logements sociaux en France continue de croître de manière inquiétante cette année. Selon Emmanuelle Cosse, présidente de l’Union sociale pour l’habitat (USH), plus de 2,6 millions de ménages sont actuellement en attente d’un logement social, une augmentation de 100.000 demandeurs par rapport à l’année précédente. Parmi eux, 1,8 million espèrent accéder pour la première fois à un logement social, tandis que 870.000 personnes déjà logées cherchent à déménager vers une nouvelle habitation.

Cette hausse de la demande, visible dans toutes les régions de France, met en lumière la persistance de la difficulté à accéder à des logements abordables. « C’est un phénomène récurrent qui démontre combien la question de l’accès à un logement abordable est cruciale », a déclaré Emmanuelle Cosse lors d’une conférence de presse.

Cette situation de pénurie s’explique notamment par la baisse du nombre de nouveaux logements sociaux agréés. En 2023, seulement 82.000 logements ont été construits, contre 120.000 il y a cinq ans. Ce recul de 30 % alimente la frustration des demandeurs et des acteurs du secteur, qui voient leurs efforts ralentis par des contraintes budgétaires et politiques.

Au-delà de la baisse des nouvelles constructions, la situation est aggravée par un contexte financier défavorable pour les bailleurs sociaux. En octobre 2023, l’ancien ministre du Logement, Patrice Vergriete, avait promis une enveloppe de 1,2 milliard d’euros sur trois ans pour la rénovation du parc social, soit 400 millions d’euros par an. Cependant, cet engagement a rapidement été remis en cause. En juillet 2024, Bruno Le Maire, alors ministre de l’Économie, a gelé plus de la moitié de ces crédits sans débat préalable.

Un avenir incertain pour le logement social

Ce gel budgétaire a provoqué l’indignation d’Emmanuelle Cosse, qui a dénoncé l’incapacité du gouvernement à tenir ses promesses. « Le gouvernement n’a pas tenu ses engagements. C’est absolument inadmissible qu’il n’ait pas été capable de respecter un engagement inscrit dans la loi de finances », a-t-elle fustigé. Selon elle, cette décision met en péril la rénovation des logements sociaux, un enjeu majeur pour améliorer les conditions de vie des ménages les plus précaires.

La situation financière des bailleurs sociaux est également fragilisée par d’autres facteurs, comme la réduction de loyer de solidarité (RLS) imposée par l’État, ainsi que la hausse du taux du livret A et de la TVA sur le logement social. Ces décisions ont engendré une perte de 14 milliards d’euros pour le secteur depuis 2017, selon l’USH. La hausse des taux a en outre alourdi la dette des bailleurs sociaux, qui s’appuient en grande partie sur l’épargne populaire pour financer leurs projets.

À l’approche du Congrès HLM, qui se tiendra à Montpellier à la fin du mois de septembre, Emmanuelle Cosse appelle à un nouveau pacte entre le gouvernement et le mouvement HLM pour financer la rénovation du parc de logements sociaux et encourager la décarbonation du secteur. Avec un budget incertain et des coupes budgétaires qui menacent les efforts de rénovation, la crise du logement social pourrait encore s’aggraver dans les années à venir.